Civ. 3e, 19 oct. 2022, n° 21-19.852

L’article 2265 du code civil dispose que « pour compléter la prescription, on peut joindre à sa possession celle de son auteur, de quelque manière qu’on lui ait succédé, soit à titre universel ou particulier, soit à titre lucratif ou onéreux ». Interrogée sur la portée de ce principe, la Cour de cassation indique que le juge ne peut écarter cette jonction de possession sans rechercher si la vente a porté, dans l’intention des parties, sur le local possédé par le vendeur depuis sa propre acquisition, nonobstant la numérotation erronée des lots mentionnée dans les actes.

Le contentieux trouvait son origine dans une modification de la numérotation des lots d’une copropriété non régularisée, de sorte que les caves possédées par les copropriétaires et mentionnées dans leurs actes de vente respectifs n’étaient pas celles visées par le règlement de copropriété d’origine. Informé de cette erreur, le copropriétaire du lot 82 avait accepté de restituer amiablement le local qu’il possédait à son véritable propriétaire. Il avait ensuite sollicité à son tour du propriétaire du lot 81 la remise de la cave que celui-ci occupait, puisqu’elle correspondait dans le règlement de propriété d’origine au lot 82. Néanmoins, celui-ci a refusé et a procédé à sa vente. Le copropriétaire du lot 82 a alors agi en revendication contre l’acquéreur, lequel s’est prévalu de la prescription acquisitive, le délai étant accompli en joignant sa possession à celle de son auteur. La cour d’appel a rejeté la jonction des possessions au motif que le bien est resté en dehors de la vente : les actes de vente étant relatifs au lot 81, la possession du lot 82 n’était pas transférée à l’acquéreur.

Ce raisonnement est censuré par la Cour de cassation. Celle-ci reproche à la cour d’appel de s’être attachée uniquement à la description des biens tels qu’ils figurent dans les actes, sans rechercher si les ventes n’avaient pas porté, dans l’intention des parties et à la suite de modifications mêmes irrégulières de l’emplacement et de la numération des caves, à celle possédée par le vendeur depuis sa propre acquisition et correspondant à l’emplacement d’origine de la cave constituant le lot 82 selon l’état description de division initial.

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