La France vient d’être condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme dans une affaire concernant la rétention administrative d’une mère et de son bébé pendant 11 jours.

CEDH 22 juillet 2021, n° 57035/18

 Une ressortissante malienne avait été placée en rétention administrative avec sa fille de quatre mois, née en France, au centre du Mesnil-Amelot afin qu’elles soient transférées en Italie, pays responsable de l’examen de sa demande d’asile. Elle avait fui le Mali car elle craignait une mutilation génitale et un mariage forcé.

En raison du très jeune âge de l’enfant, des conditions d’accueil dans le centre de rétention et de la durée du placement en rétention (11 jours), la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a décidé que les autorités compétentes avaient soumis ce bébé ainsi que sa mère à un traitement qui a dépassé le seuil de gravité requis par l’article 3 de la Convention (interdiction des traitements inhumains et dégradants).

Par ailleurs, la CEDH constate également la violation par la France des paragraphes 1 et 4 de l’article 5 de la Convention (droit à la liberté et à la sûreté et droit de faire statuer à bref délai sur la légalité de la détention). Compte tenu des circonstances de l’espèce, la Cour estime que les autorités françaises pas vérifié, ainsi que le prévoit le régime juridique désormais applicable en France, que le placement initial en rétention administrative de la mère accompagnée de son enfant mineur, puis la prolongation de cette rétention, constituaient des mesures de dernier ressort auxquelles aucune autre mesure moins restrictive ne pouvait être substituée. Les autorités internes n’ont pas suffisamment tenu compte, dans le cadre du contrôle juridictionnel qui leur incombe d’exercer, du statut d’enfant mineur, dans l’appréciation de la légalité du placement initial et la décision d’ordonner la prolongation de la rétention administrative. Elles auraient dû s’assurer effectivement de la légalité du placement initial puis du maintien en rétention de l’enfant mineur en recherchant si une autre mesure, moins restrictive, comme l’assignation à résidence dont les requérantes avaient auparavant fait l’objet, était envisageable. L’enfant mineur n’a donc pas bénéficié d’un contrôle juridictionnel portant sur l’ensemble des conditions auxquelles est subordonnée la régularité de la rétention au regard de l’article 5 § 1 de la Convention.

La Cour européenne demande à la France de verser aux requérantes 10 000 euros pour dommage moral, et 6 780 euros pour frais et dépens.

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