CE, réf., 16 février 2021, n° 449605

En période de crise sanitaire, le maire qui interdit temporairement les locations saisonnières porte une atteinte grave et manifestement illégale au droit de propriété et à la liberté du commerce et de l’industrie.

Afin de prévenir la propagation du virus covid-19, le maire de Nice avait pris un arrêté interdisant, du 6 au 20 février 2021, les locations saisonnières.

Le juge des référés du tribunal administratif de Nice, saisi par l’Union des professionnels de la location touristique (UPLT) a suspendu l’exécution de cet arrêté par une ordonnance du 8 février 2021. La commune de Nice a fait appel devant le Conseil d’État.

Selon le juge des référés du Conseil d’État, « le législateur a institué une police spéciale donnant aux autorités de l’État mentionnées aux articles L. 3131-15 à L. 3131-17 du code de la santé publique la compétence pour édicter, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, les mesures générales ou individuelles visant à mettre fin à une catastrophe sanitaire telle que l’épidémie de covid-19, en vue, notamment, d’assurer, compte tenu des données scientifiques disponibles, leur cohérence et leur efficacité sur l’ensemble du territoire concerné et de les adapter en fonction de l’évolution de la situation ».

Le code général des collectivités territoriales autorise le maire, y compris en période d’état d’urgence sanitaire, à prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques dans sa commune. Toutefois, « la police spéciale instituée par le législateur fait obstacle, pendant la période où elle trouve à s’appliquer, à ce que le maire prenne au titre de son pouvoir de police générale des mesures destinées à lutter contre la catastrophe sanitaire, à moins que des raisons impérieuses liées à des circonstances locales en rendent l’édiction » indispensable et à condition de ne pas compromettre, ce faisant, la cohérence et l’efficacité de celles prises dans ce but par les autorités compétentes de l’État ».

Le juge des référés rejette la requête de la commune de Nice. En effet, il constate l’inexistence d’un risque d’afflux significatif de touristes à Nice dans la période couverte par l’arrêté litigieux en raison de la saison hivernale et du report du carnaval. Il n’est pas non plus prouvé que l’interdiction des locations touristiques peut avoir un impact notable sur la propagation du virus. De plus la commune ne justifie pas que « les spécificités de la situation sanitaire sur son territoire nécessiteraient l’interdiction des locations touristiques » ; cette mesure étant jugé inappropriée par le préfet des Alpes-Maritimes et les maires des communes voisines. Il n’est ainsi pas démontré par la commune de Nice « l’existence de raisons impérieuses liées à des circonstances locales propres » rendant indispensable l’édiction de l’arrêté interdisant temporairement les locations saisonnières : cet arrêté porte une atteinte grave et manifestement illégale au droit de propriété et à la liberté du commerce et de l’industrie.

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